La mobilité n'est pas un sujet rh

En échangeant avec différents acteurs RH (DRH, journalistes, conseils, et même France Travail) aucun ne place la mobilité des collaborateurs comme une priorité. Et pourtant ?

Le vélo est un moyen de déplacement écologique et économique (voire frugal) de plus en plus plébiscité par les Français. Il est donc normal que les entreprises cherchent à encourager leurs salariés à utiliser ce mode de transport. C'est dans ce contexte que l'indemnité kilométrique vélo a été mise en place en France. Elle a depuis été remplacée par le forfait mobilité durable. Cette aide financière permet aux salariés qui se rendent au travail notamment à vélo de bénéficier d'une compensation financière de la part de leur employeur. 

Des priorités différentes

Depuis quelques temps, je plonge dans le monde (insoupçonné) des RH, pour essayer de comprendre pourquoi la mobilité n'apparait pas. J'ai interviewé des RH, des podcasteurs, des services RH, des bloggeurs... et la même rengaine en boucle. La mobilité ne peut pas être une priorité. A la fois, parce-que c'est un sujet qui parait clivant et aussi parce-que les priorités sont (trop?) nombreuses: 

  • La réglementation et le bilan carbone
  • L'organisation du travail et le retour au bureau
  • la fidélisation et le bien-être des collaborateurs (la réduction du turn-over)
  • La diversité et l'équité

Mais aussi probablement parce-que c'est complexe. Les points d'entrée sur ces sujets sont multiples.

Selon la loi LOM de 2019, les négociations annuelles obligatoires (NAO) doivent intégrer le sujet de la mobilité. Malheureusement, comme la plupart des sujets de transition écologique, la mobilité est le parent pauvre de ces négociations. Sauf peut être sur la prime carburant. 

Les employeurs qui disposent d'un CSE sont aussi concernés : quel catalogue, comment limiter l'impact notamment des voyages promus par ce CSE qui peut alourdir considérablement le bilan carbone...

Les parkings sont gérés par les services généraux, la sécurisation, l'électrification sont souvent les priorités bien avant le partagé de l'espace pour tous les modes ou les aménagements cyclistes. 

Les flottes de voitures (de service  ou de fonction) sont géréés par un gestionnaire de flottes qui se focalisent sur l'optimisation des coûts et l'électrification. Les RH y collaborent ponctuellement que ce soit à l'embauche ou lors des augmentations pour les packages salariaux. 

Naturellement, les équipes RSE identifie la mobilité comme problématique notamment sur les activités tertiaires (environ 30% des émissions de scope 3) mais difficile d'embarquer tout le monde. 

Des opportunités différenciantes

Parlons (écrivons) peu, mais écrivons bien, en quelques chiffres, la mobilité durable est une vraie opportunité RH différenciante de performance.

  • Les collaborateurs cyclistes sont 15% moins absents que les autres
  • 60% des collaborateurs ne se projettent pas à plus de 5 ans dans leur structure si les trajets sont supérieurs à 20 min
  • Les navetteurs actifs ressentent 40% de stress en moins que les autres
  • Les collaborateurs qui pratiquent une activité physique sont 6 à 9% plus productifs

Ces chiffres montrent l'impact direct de la mobilité sur les performances économiques d'une entreprise. Accompagner durablement (ou faire bouger de façon responsable) ses collaborateurs, c'est un enjeu d'attractivité, de productivité, de fidélisation et aussi de diversité.

Cela nécessite une démarche de transformation. On ne passe pas en un claquement de doigt à un système tout voiture à une mobilité multimodale !

Les indicateurs de suivi et de réussite de la démarche sont nombreux et peuvent s'adapter à la structure visée : turn-over, productivité, bien être au travail, coût de recrutement..

Une démarche à construire

Aujourd'hui, le sujet n'est pas soumis à des obligations et fait l'objet de soupoudrage... Un forfait mobilité par ici. Une prime par là. Une appli de covoiturage... 

Le sujet est souvent porté par la RSE, les services généraux et ne fait pas l'objet d'une planification ou concertation. Et pourtant, c'est un sujet RH. 

La voiture (thermique) est omniprésente dans les déplacements domicile / travail mais aussi professionnels. Remettre en cause sa toute puissance peut être perçu comme une cause perdue:

Il faut sensibiliser et former les équipes, les partenaires sociaux, entraîner des changements dans l'organisation de travail (par exemple dans la gestion des tournées).

C'est aussi une belle opportunité de fédérer sur un sujet transverse: politique salariale, organisation du travail, impact écologique, intégration de la diversité... 

Depuis 2019, la mobilité doit être discutée lors des négociations annuelles. Aujourd'hui, les partenaires sociaux ne sont que peu sensibilisés au sujet. Les employeurs sont largement en retard sur l'électrification des flottes (12% vs 22% des ménages - un des niveaux les plus bas en Europe) malgré des incitatifs financiers importants. 

Et si il était temps que les RH s'emparent du sujet ?

On en parle ?

Au feu rouge, perché sur un vélo ?
ou simplement par visio pour positionner les bases d'une réflexion et de VOS enjeux (pas celui de Jean Michel, le boulanger)

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